A Paris, une exposition pour porter un autre regard sur l’avortement

La photographe espagnole Laia Abril s’intéresse depuis 2016 aux inégalités de genre et aux problèmes liés à la sexualité. Elle en a tiré un livre que Médecins sans Frontières a décliné sous forme d’une exposition haletante, à découvrir à la Maison des Métallos.

Trois femmes photographiées par Laia Abril, dont le destin est étroitement lié à l’avortement.

Des visages intenses fixent l’objectif et pénètrent notre regard. Des clichés de maisons désaffectées ou d’objets liés à l’avortement, débarrassés de toute présence humaine. Ces photos en noir et blanc contrastent avec des documents, majoritairement en couleur, qui rythment l’exposition de la photographe espagnole Laia Abril, donnant un contexte historique et géographique sur l’avortement. On découvre ainsi des instruments de contraception d’antan, des représentations religieuses, et même le premier drone distributeur de pilule abortive de l’histoire.

Le premier drone distribuant des pillules abortives, partant de Francfort en Allemagne

 

 

Mais ce qui reste le plus marquant, ce sont les textes qui accompagnent les images, terribles de crudité : « les images ne sont pas choquantes, mais les histoires le sont » reconnaît l’artiste, ex-journaliste reconvertie dans la photo. Recueillis au fil des rencontres, les mots révèlent les destins chahutés de ces femmes, plongeant le visiteur dans une réalité très concrète, plutôt que d’imposer des chiffres et des statistiques abstraits. 

Repenser le problème

Lois du pays, normes sociales ou religieuses, stigmatisation, manque d’argent... les causes de l’avortement sont trop souvent des concepts abscons, alors l’artiste a fait le choix de se concentrer plutôt sur leurs conséquences. « Le premier chapitre de ce projet ne traite pas directement de l’avortement mais des répercussions quand on n’y a pas accès ». 

Hippocratic betrayal and obstetric violence, 2016, Laia Abril

 

 

 

Par ses images, la photographe de 32 ans invite ainsi chacun à repenser le problème avec une perspective nouvelle : observer avec autant de transparence que possible les répercussions d’un tel acte sur celles qui en souffrent.

“Une image vaut mille mots”

De fait, la photographie est surtout un témoin, qui montre la détresse et permet de mieux comprendre leur choix. « Si tu as une image qui est imprégnée de l’histoire, qui active ta curiosité et te force à lire, alors ton expérience est très différente. Lorsque j’ai réalisé ce livre, je souhaitais que le spectateur puisse visualiser ces histoires et leurs répercussions, afin qu’il soit en mesure de ressentir de l’empathie pour une situation à laquelle il ne se serait pas totalement accordé initialement ».


A voir : On Abortion, jusqu’au 9 décembre, à la Maison des Métallos. Entrée libre, à partir de 15 ans.

A lire : History of Misogyny, Chapter One : On Abortion (2017),

 

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